![J'ai compris qu'il ne suffit pas de survivre. Survivre ce n'est pas assez. J'ai aussi compris que la naissance de chaque être est en même temps sa condamnation à mort, et je me demande quel sens cela peut avoir. Pourquoi est-ce que je vis ? [Edgar Hilsenrath]](https://i.skyrock.net/0036/88560036/pics/3239828165_1_3_AnrboGEt.png)
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FUCK AMERICA, d'Edgar Hilsenrath
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Titre : Fuck America
Edition : éditions point 2.
Pages : 409 _ Date de parution : 2009
Genre : Largement autobiographique, loufoque, cru
Résumé : Un putain de livre. C'est ce que je vais écrire. Un livre sur l'expérience des ghettos juifs. Pour l'instant, entre les jobs miteux, les clodos et les putes, je n'ai trouvé qu'un titre : LE BRANLEUR. Un bon titre. Un futur best-seller à coup sûr ! [résumé quatrième de couverture]
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Mon avis : Il me faut vous parler aujourd'hui de « Fuck America » écrit par l'allemand Edgar Hilsenrath. A vrai dire, je l'ai acheté dans un endroit où on peut acheter les livres qui ne coûte vraiment pas cher pour la plupart (une sorte d'association), et j'ai trouvé un tout petit livre tout mignon (le plus poche de tous les livres poches que j'ai vue jusque là), qui se tient et se lit à la verticale (les phrases sont de droite à gauche, mais le livre se tient à la verticale, comme sur cette image), avec de jolies couleurs et un titre assez surprenant, mais accrocheur finalement. Puis j'ai lu le résumé, que j'ai trouvé également très étrange, alors, je l'ai acheté. Et je savais que ce livre allait sortir du lot, qu'il allait être bizarre et différent. Et je ne savais vraiment pas à quoi m'attendre sinon, mais il était assez intriguant. Et finalement, je l'ai beaucoup aimé, et comme je m'y attendais, il est très étrange, mais je l'ai beaucoup apprécié.
Le début du livre nous donne immédiatement la note qu'aura le roman tout le long de sa lecture : en parlant avec légèreté de choses lourdes. Car le livre commence avec une lettre envoyé d'un juif polonais nommé Nathan Bronsky, qui envoie une lettre au consul général des États-Unis d'Amérique, afin d'obtenir un visa d'immigration. Nous sommes en novembre 1938, et ça commence à puer un petit peu en Europe. Ce à quoi le consul général lui répond : « Renvoyez-moi les formulaires de demande et veuillez attendre treize ans. ». Les choses sont dites et le ton est donné. Et pour ce qu'il s'agit du ton, l'ensemble est cynique et dérangeant, originale et loufoque. Pour tout vous dire, ce roman est vraiment surprenant, un peu dérangeant parfois, notamment parce que tout y est décrit très crûment. De temps à autre, on parle de sexe de manière assez cru, certes, les envies sont bestiales. En faites, je ne trouve pas cela très surprenant, c'est dans l'ambiance générale du livre selon moi. Les dialogues paraissent vraiment du tac au tac et percutants. Et d'ailleurs, le personnage principal, le fils de Nathan Bronsky, Jakob Bronsky, est un homme solitaire, il lui arrive fréquemment de s'inventer des discussions imaginaires avec des personnes réelles ou inventées physiquement absentes. Et c'est quelque chose d'assez spéciale que j'ai beaucoup apprécié : ce doute persistant, où on ne sait jamais vraiment si les choses contées pour Jakob sont vraies ou non, ou, tout du moins, sont le fruit de son imagination ou pas. Et c'est du fond de sa misère qu'il s'invente sa vie rêvée, où il est homme de lettre et homme à femme. Bref, ce livre ne ménage pas son lecteur : il le bouscule et le sors de ses habitudes !
Pour vous parler un peu plus de Jakob Bronsky, il s'agit d'un juif d'origine polonaise qui a pu immigrer aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale, au moment où il n'en avait plus besoin. Les États-Unis d'Amérique lui a fermé ses portes à lui et à sa famille au moment où il en avait le plus besoin, et lui a ouvert ses portes au moment où il n'y avait plus aucun intérêt d'y venir. Tout cela décrit dans le livre avec force ironie, un arrière-goût amer. Il vit une existence misérable à New York, comme pour beaucoup d'immigrés. Il a tout oublié de la guerre, son esprit ne veut pas s'en souvenir. Et finalement, entre envies sexuelles démesurées et recherche successive d'argent par le biais de différents petits boulots, il est bien décidé d'écrire un roman, son nom ? LE BRANLEUR. Il veut parler des ghettos juifs. Mais de son livre, nous ne connaissons finalement que son avancement. Ce qu'on peut lire, c'est la vie de Jakob Bronky, oscillant entre sa vie et son imagination. Ses soudaines envie sexuel qu'il n'arrive pas à assouvir (je cite « Ce matin-là, je n'arrivais pas à calmer ma bite. A la maison, j'ai pris une douche froide illico. Ça n'a servi à rien. J'ai pensé à Auschwitz. En vain. ») et ses histoires de grand homme de lettre. La Shoah est presque là, mais est exprimé sur le ton de la farce. Tout du long, le roman flirt entre de l'humour noir et le cynisme, et n'est clairement pas politiquement correct. Les dialogues y sont éloquents, et j'avoue que lorsque je l'ai lu je ne me rendais absolument pas compte des pages que je tournais, on le dévore sans s'en rendre vraiment compte.
Je ne peux donc que vous conseiller de lire « Fuck America », si vous n'avez pas peur d'être bousculé. Ce sera l'occasion de lire un roman sur la Shoah, politiquement pas correct, qui alterne entre situations loufoques, drôles et des récits particulièrement touchants. Ce livre n'est pas dans la norme, pas de soucis à se faire là-dessus. Il se lit d'une traite et on en redemande. Pour ma part, très très bonne découverte.
Ma note : 8,5/10
Votre note : 6,5/10 (1 note)
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FloydBooks, Posté le samedi 23 mai 2015 10:11
Attends, tu as dit cynique, bizarre et humour noir ?! Mais il me FAUT ce livre dans ce cas ! Merci pour cette découverte :)